Hodgkin mon ami

Hodgkin mon ami

5) Premières chimio

Ma nuit a été difficile, inutile de vous le dire. Très peu de sommeil, tout ce bruit, cette lumière de néon, ce brassard qui me sert toutes les demi-heures pour me prendre la tension…déjà avec ça, c’est beaucoup mais alors avec cette annonce de diagnostic….pff

Ah tiens je vais prendre mon ordi pour comprendre un peu plus de quoi on parle avec ce lymphome de Hodgkin…

Et m… j’oubliais, pas de couverture GSM, je n’aurai donc jamais internet ici (j’utilise mon GSM comme modem)…il n’y a donc pas grand-chose à faire, réfléchir, penser à  cette descente aux enfers.

Parce que c’est bien ça dont on parle, une chute libre après l’annonce de ce genre de diagnostic.

J’entends encore tout le monde, y compris le psychologue qui va me suivre plus tard :

« mais non ce n’est pas de ta faute… » et pourtant beaucoup de personnes touchées par cette maladie vous le diront, c’est un sentiment de plonger nos proches dans une vrai galère, presque de les abandonner qui nous envahit.

C’est bien ce que je ressens en ce moment, je laisse ma femme avec 3 enfants à gérer, dont deux jumelles à peine âgées de 7 mois et une fille d’un peu plus de 3 ans.

Que va devenir notre famille, comment l’annoncer à mes parents, mes amis… ?

Les premiers moments sont très difficiles, je n’ai eu que des questions sans réponse.

 

7h00, en Réa médicale à Saint-Louis c’est l’heure de la radio comme chaque matin, j’y ai donc droit (ce sera la première d’une longue série d’ailleurs), puis arrive le petit-déjeuner…

Hop main gauche j’enlève le masque à oxygène, hop main droite je prendre ma tartine…

Enfin un médecin arrive, c’est le Responsable du service, il me réexplique vaguement ma maladie, mais surtout me dit tout de suite qu’elle se guérit très bien et que je suis entre les mains d’un des 10 spécialistes au monde, ici à St-Louis. C’est déjà ça, et c’est aussi ce qui me permettra, entre autre, de mieux accepter ce qu’il m’arrive et de me projeter sur l’après…

Il m’explique également qu’ils vont devoir me poser un cathéter fémoral puisque celui qu’on pose en principe pour une chimio (un PAC pour mes amis connaisseurs) se pose au bloc sous la peau au niveau du muscle pectoral disons.

Mais là, je suis toujours en insuffisance respiratoire, je ne suis pas encore remis de ma pneumopathie, ce sera donc un cathé’ fémoral !

« ah oui déjà ?! »

« et oui, il faut commencer la chimio aujourd’hui !! », il m’explique le protocole du J1 (injection Jour 1) puis J8 avec une aplasie autour du J12 puis on remet ça toutes les trois semaines…bref j’y comprends rien…

 

 

C’est l’heure de la pose du cathé, arrive donc le plombier !! :-) si si cette intervention s’apparente vraiment à ce corps de métier.

En bref, tout se passe à l’aine, zone qui a été préalablement rasée de tout poil.

Il faut que je vous raconte :

Un infirmier arrive un peu plus tôt, « bonjour, on va vous raser pour poser le cathé »

« ah oui, où ça ? »

« à l’aine mais un peu plus large, jusqu’au pubis… »

« hop hop, je peux le faire moi-même ?.. !! hein »

« non, non c’est bon, j’ai la tondeuse » (ouf déjà c’est pas au rasoir)

« bon bin allez-y »

Zzzhhhhhhh rrrrhhhhh et zzzzzhzhh rhhhhhh

« Voilà ! »

« euh nan mais c’est pas possible, vous pouvez pas me laisser comme ça, regardez y’a un côté rasé et un côté avec les poils…ah la touche que j’ai, on dirait « Double-Faces » dans Batman (oui je sais toujours le même genre de références cinématographique) »

« oh vous savez, dans quelques jours tout ça va tomber ! »

Bam je ne l’avais pas vu venir celle-là mais il n’a pas tort.

 

Bon revenons à notre plombier, ses deux assistants plombiers sont là. Hop une piqure anesthésiante, une incision, et on m’enfonce une espèce de tuyau flexible de près d’un demi-mètre de long dans une grosse veine fémorale, hop hop un peu de soudure pour fixer le cathé et me voilà opérationnel.

j'entends encore leur discussion quand le premier m'enfonce le "flexible dans la veine"

"ah ouais d'accord, tu l'enfonce comme ça ?! direct..?"

"oh oui, pas la peine de te prendre la tête..."

hey, oh chui là moi...

 

Arrive le moment tant redouté où je dois l’annoncer à mes parents et  à mes proches.

Je ne m’étalerai pas longtemps sur ce moment qui vous vous en doutez ont a difficile.

Les infirmières m’ont passé le téléphone du service, mais à vrai dire au premier coup de fil, aucun mot n’est sorti de ma bouche, il a fallu que je rappelle mes parents une deuxième fois pour expliquer ma situation. Je ne leur avais rien dit ne sachant pas ce que j’avais avant, ça ne servait à rien.

Lorsque mes amis proches ont su, forcément ce fut également difficile.

J’ai dû l’annoncer à l’un d’eux, un que je considère un peu comme mon frère (étant fils unique) le jour de son anniversaire !! super comme cadeau.

Quant à mon autre meilleur ami (mon autre frère si on veut) il voulait m’annoncer qu’il allait être papa… et bin voilà j’ai bien gâché la fête…

Mes parents et mes amis proches, ma famille, mes collgèues sont venus très vite me voir, une fois les sanglots essuyés je me suis sentis soutenu, entouré, ce fut très important pour moi.

 

Le personnel médical de la Réa est super avec moi, disponible, à l’écoute, ils savent m’expliquer ce qu’ils m’injectent car ça y est, les premières gouttes de chimio coulent dans mes veines. Je n’ai qu’une chose en tête, quand vais-je perdre mes cheveux et quand vais-je commencer à ressentir les effets, à déguster…

Ils m’ont bien expliqué, le Beacopp escaladé, c’est coriace, va falloir vous accrocher et être fort !! (ba tiens, j’ai pas le choix de toute manière j’aurai quand même préféré un coup de cortisone bordel…)

 

Les jours qui suivent se ressemblent, je tourne en rond, enfin non je suis cloué sur mon lit donc je ne tourne pas mais le cœur y est… :-)

Je suis tellement faible à cause de cette pneumopathie que le simple fait de me brosser les dents m’essouffle, je n’ai même pas assez de force pour me laver.

Je perds du poids à vue d’œil, forcément avec bouffe servie sur les plateaux repas (non je n’appellerai pas ça de la nourriture, il y a d’ailleurs certains plats où rien que le fait d’y penser j’en ai la nausée…passons à autre chose sinon je vais rendre sur mon clavier beuuhhh)

Tout ça contribue à cette descente aux enfers…mais le plus important, je n’ai toujours pas revue ma femme et mes filles depuis bientôt 10 jours, elles me manquent terriblement, j’ai heureusement d’autres visites, beaucoup de monde vient me voir.

Après une longue discussion avec le chef du service je comprends qu’il est compliqué de faire rentrer un enfant de 3 ans dans le service, mais compte tenu de la situation il m’accorde une dizaine de minutes avec ma femme et Margaux.

C’est une super nouvelle, mais il va falloir que j’assure, ne pas pleurer, et comment faire avec ce masque à oxygène, ça va lui faire un choc.

Heureusement les médecins me proposent une solution

« vous allez mettre les lunettes…. !! »

(??!! Les lunettes, ils se foutent de moi ou quoi)

« qué lunettes… ? »

« ah, c’est un tuyau qui se met derrière les oreilles et vous permet d’avoir une arrivée d’oxygène dans les narines, en revanche on va vous mettre un débit assez fort juste pour les 10 minutes, ça risque de vous bruler les narines… »

Effectivement, ça brule, la vache…j’ai l’impression de respirer de la colle pure, ou plutôt vous savez quand on a de l’eau de mer qui rentre dans les narines, hein…ça brule un peu, bin voilà c’est ça à chaque respiration…mmhhh

 

Ça y est, ma femme et Margaux sont dans la salle d’attente, le chef de service les emmène dans son bureau pour expliquer à Margaux dans son langage ce qu’il m’arrive, histoire de bien la préparer. Je ne vous cache pas ma forte émotion lorsqu’elles sont rentrées dans ma chambre, difficile de contenir mes émotions en pareil moment. Nous avions eu la bonne idée avec ma femme de lui dire d’apporter sa valise de docteur, elle adore jouer au docteur, ça fonctionnera après quelques minutes d’adaptation, je n’ai pas vu passer ces 10 minutes que c’est déjà le moment pour elles de repartir…

Margaux me demandera, des semaines plus tard pourquoi j’avais eu les yeux rouges dans la chambre…

 

Les quelques jours qui suivent se ressemblent, la radio, le petit-déj, la toilettes, les DVD, heureusement que j’ai des visites, mes parents, mes amis, mes collègues, ils m’aident à tenir dans cet endroit clos. Le personnel discute aussi de temps en temps avec moi, ceci dit je comprends un peu. Je dois être l’un des rares patients à être conscient et non intubé. (tu m’étonnes que l’absence de TV ne pose pas tant que ça de problème…y’a personne pour la réclamer).

Ma santé s’améliore, j’ai de moins en moins besoin d’oxygène, on m’a dit :

« quand le robinet d’arrivée d’oxygène sera à moins de 3 litres, vous pourrez monter en service Hématologie, là-bas y’a la TV, une fenêtre, les GSM captent et même des toilettes !!… »

Mon dieu mais c’est palace !!! 3 litre, 3 litres, 3 litres !!! j’essaye un peu tout, l’apnée, gonfler les poumons à fond mais rien n’y fait, le pourcentage d’oxygène dans le sang ne bouge vraiment….ah si y’a quand même quelque chose qui réagit, ça se met à sonner au niveau du cœur et forcément ça fait réagir le personnel médicale (je sais quoi faire maintenant s’ils ne viennent pas quand je sonnerai sur le bouton rouge)

 

@suivre…



14/12/2013
7 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Santé & Bien-être pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 19 autres membres